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L'HISTOIRE DES MUSCADINS

Le lecteur s'il habite la région des Pierres Dorées depuis une décennie ou deux aura, sans doute, entendu parler des " Muscadins de Theizé ", sans toujours connaître l'origine de cette " appellation ".Il est tout excusé tant la conspiration du silence a été grande jusqu'à nos jours ou presque.


Plusieurs auteurs ont plus ou moins retracé des épisodes de cette affaire et nous devons à Jacques Branciard de Gleizé, d'avoir récemment (en 1994) présenté un mémoire sérieux et documenté sur cette page de l'histoire de Theizé et des communes environnantes.

En 1793, la situation de la France est tragique : sur le territoire national, c'est la guerre civile ; aux frontières, les coalisés (émigrés et troupes étrangères) poursuivent leur offensive. Cette situation est particulièrement confuse dans notre région : Lyon est en effet aux mains des insurgés qui ont arrêté Chalier et Bertrand le 29 mai. Ce sont des Girondins modérés qui veulent arrêter les excès de la Révolution mais aussi de riches bourgeois et des royalistes contre-révolutionnaires qui veulent rester maîtres de la situation.

 

Robespierre et les Montagnards, qui contrôlent la Convention, après la chute des Girondins le 2 juin 1793 , instaurent un régime de terreur pour lutter contre les ennemis de l'intérieur et de l'extérieur. Le 12 juillet, la ville de Lyon est décrétée en état de rébellion contre la République. Le 16 juillet, Challier est guillotiné et le siège de Lyon débute le 7 août. Le 29 août , une bataille meurtrière repousse les assaillants hors de Lyon. Mais le 9 octobre, l'armée du Général Doppet, aidée des " gardes nationales " locales, reprend la ville tandis que les insurgés lyonnais, commandés par le général de Précy, s'enfuient de Lyon par Vaise et les Monts d'Or. Ils veulent gagner la Suisse mais, arrêtés par des gardes nationales, n'y parviendront pas. Ils se dirigent donc sur Morancé et les Bois d'Alix. Ce qui s'est passé alors dans ces bois a été à peu près retracé de la manière suivante, à partir de documents authentiques mais aussi de la tradition orale, avec toutes ses incertitudes et ses contradictions. Citons, sur ce point, le florilège rassemblé par J. Branciard :

" En ce temps-là, les bois d'Alix s'étendaient jusqu'en haut du coteau et les villages de Theizé, Jarnioux, Pouilly, Lachassagne, Charnay et Châtillon étaient à l'orée de cette forêt peuplée de loups et de bandits."


C'était au temps de la grande Révolution et les riches lyonnais que l'on appelait alors les Muscadins avaient quitté leur ville où on ne leur voulait sans doute pas que du bien : ils étaient à la fuite et, emportant tous leurs biens, ils crurent trouver refuge dans les bois d'Alix.

Alors les gens de Theizé, d'Alix et de toutes les communes environnantes étaient descendus dans les bois et la chasse avait commencé. L'endroit où l'on s'était battu le plus, c'était à Bourland, vers la chapelle St Hyppolite et aussi du côté de la ferme de Yabotte, à la limite des territoires de Theizé, Frontenas et Alix, à l'endroit qu'on appelle maintenant le Maupas. Ce qui s'y passa exactement, nul ne peut plus le raconter, mais ce qui est sûr, c'est que bien peu de Muscadins survécurent et que leurs écus, leurs bijoux, leurs armes et leurs chevaux devinrent la propriété de ceux qui s'étaient donné la peine de les égorger. Les dépouilles quant à elles furent jetées dans un puits à Alix, on l'appelle puits des morts.

Ceux de Theizé avaient tenu leur place dans la curée, mais certains d'entre eux trouvèrent plus commode de proposer le salut à ceux qu'ils avaient débusqués, de ramener ces malheureux chez eux, de leur donner à souper et à coucher et de les " dépêcher " tranquillement dans leur sommeil. Comme ça ils s'éviteraient la peine du transport du butin ; quant au partage, il était tout fait. Les restes des malheureux lyonnais sont encore enterrés dans les caves, les cuvages, et aussi dans les souterrains qui truffent les sous-sol du village, selon les rumeurs.

Depuis ce temps on appelle les gens de Theizé " les Muscadins ". Et le village est mal vu dans les environs. Jusqu'à la guerre, aucune fille ni aucun gars de Theizé ne trouvait à se marier en dehors de la commune, et quand les jeunes descendaient du village que ce soit pour la vogue, ou pour n'importe quel événement qu'on fêtait dans un autre village, ça ne manquait jamais de provoquer la bagarre. Les gens leur en voulaient pour ce qu'ils avaient fait pendant la Révolution.

Mais eux, ils étaient devenus riches, du moins les familles de ceux qui avaient participé à l'attaque des lyonnais. On en a vu certains qui n'avaient rien avant le massacre, exhiber soudain des louis d'or pour acheter la terre ; les filles à marier proposer de riches dots alors que précédemment leurs familles manquaient du nécessaire. Et quelques années plus tard, on a vu sortir de terre toutes ces grosses maisons en pierres dorées qu'on trouve à Theizé.


Au début du siècle, quelqu'un de Villefranche a fait un livre où tous ces évènements étaient racontés et prouvés. Mais les familles des Muscadins sont intervenues, on ne sait pas s'ils ont menacé l'auteur ou s'ils l'ont corrompu mais tous les exemplaires de cet ouvrage ont été détruits ainsi que le manuscrit.

Aujourd'hui tous ces évènements s'oublient peu à peu, dans le village, ce n'est pas un sujet de conversation qu'on aborde facilement et puis les générations passent…

Les seules traces qui demeurent, à part les maisons, c'est l'or. Mais, ça personne ne vous le montrera, même s'il en reste beaucoup dans certaines familles. De temps en temps on fait aussi des découvertes. Il y a une vingtaine d'années, on a trouvé chez X, des équipements complets de cavalerie qui dataient de la Révolution et qui avaient été enterrés dans le cuvier. Et la provenance de ces harnachements, elle ne fait pas beaucoup de doute.

En 1793, on donna ce nom aux élégants d'une jeunesse dorée qui affectaient une mine soignée et des opinions royalistes et dont le musc était un des parfums favoris. Ils s'organisaient en bandes et, avec leur gourdin plombé, ils molestaient les vendeurs de feuilles jacobines.

Cette appellation fut naturellement attribuée aux riches Lyonnais de l'armée du général de Précy et, plus curieusement, le nom des victimes fut collé à la peau de leurs agresseurs d'où les " muscadins de Theizé "

 


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